Quels sont les aspects de la dyslexie.une perception altérée des sons ?

La dyslexie a été classifiée selon le DSM 5 sous le terme générique de « trouble spécifique de l’apprentissage ». Les troubles de l’apprentissage englobent tous les troubles dans lesquels une seule fonction cognitive est altérée, les autres capacités intellectuelles étant intactes. Le trouble de la dyslexie est un trouble développemental spécifique qui, dès les années 1970, s’est classiquement défini en termes de catégories d’exclusion. Par exemple, lors de la fédération mondiale de neurologie, Critchley (1970), a énoncé que la dyslexie développementale spécifique était un trouble se manifestant par une difficulté à apprendre à lire en dépit d’un enseignement classique, d’une intelligence normale et de conditions socioculturelles adéquates. Ce trouble atteint environ 5 à 10 % des individus et est également connu pour durer tout au long de la vie malgré un travail intensif sur les compétences de lecture (P J Bailey & Snowling, 2002; Démonet et al., 2004; Lyon et al., 2003; Ramus, 2001; Snowling & Melby-Lervåg, 2016). La dyslexie relève d’une inaptitude cognitive fondamentale sous-entendant que les personnes dyslexiques doivent avoir un déficit en lecture suffisamment spécifique à l’écrit et à l’oral sans avoir de déficience au niveau du fonctionnement cognitif général.

La dyslexie

Dyslexie : Déficit phonologique et perception altérée des sons

Les enfants atteints de dyslexie ont donc des difficultés à apprendre à lire et écrire avec la même facilité, précision et rapidité qu’un enfant neurotypique. Bien que plusieurs causes possibles aient été proposées pour la dyslexie, la principale est un déficit phonologique, c’est-à-dire une difficulté à traiter les sons du langage. Le déficit affecte principalement la conscience phonologique, l’accès conscient, des sons de la parole (Boets et al., 2013; Lieder et al., 2019; Swan & Goswami, 1997), la capacité à former des représentations des sons catégoriques, ainsi que la dénomination et la mémoire verbale (Vellutino et al., 2004) Ce trouble neuro développemental, spécifique à la lecture/écriture, a donc des causes sous-jacentes complexes qu’il est nécessaire de comprendre.

Une étude pionnière a d’ailleurs démontré que les sujets atteints de dyslexie avaient un jugement auditif déviant par rapport aux individus neurotypiques (P Tallal & Stark, 1981; Paula Tallal et al., 1993). Les chercheurs ont utilisé un test de jugement temporel, consistant à faire écouter deux sons à deux groupes de sujets distincts (groupe atteint de dyslexie et normaux-lecteurs), en faisant varier l’intervalle de temps entre eux. Ils se sont aperçus que les individus du groupe souffrant de troubles dyslexiques avaient plus de difficultés à discriminer ces deux sons lorsque l’intervalle était très bref, inférieur à 150 ms. Cela suggère que la perception des transitions rapides au sein du signal de la parole, c’est-à-dire le traitement des informations rapides inhérentes à ce signal, est moins précise parmi la population atteinte de dyslexie. En d’autres termes, le traitement de la transition des formants, qui sont des transitions rapides de l’ordre de 40 ms, est moins efficace.

Troubles de la perception catégorielle

Comme nous l’avons expliqué, les capacités de segmentation et de représentation phonémique sont nécessaires pour une bonne conscience phonologique et donc pour la mise en correspondance des graphèmes et des phonèmes lors de la lecture. On nomme cela aussi la perception catégorielle, la capacité à catégoriser progressivement les unités sonores produites, de déterminer graduellement les frontières entre elles permettant ainsi leur discrimination, quelles que soient les variations dans la prononciation, par exemple quel que soit le locuteur.

Les études entreprises par Paula Tallal démontrant un déficit des traitements auditifs des signaux sonores ont permis aussi de démontrer par la suite un déficit de perception catégorielle. Les temps de réaction pour déterminer la frontière entre deux phonèmes ont en effet été démontrés comme étant plus long chez les dyslexiques (Reed, 1989; Tallal, 1980). Cela signifie en d’autres termes que les individus dyslexiques pourraient avoir une perception inter-catégorielle moins bien clairement définie (Manis et al., 1997). Cela pourrait alors aussi suggérer qu’au contraire, les individus dyslexiques ont une perception intra-catégorielle plus développée que les individus normo-lecteurs car ils perçoivent plus de variances acoustiques d’un son appartenant à la même catégorie. Par exemple, entre le /p/ et le /b/ des syllabes /pa/ et /ba/ proposées dans un continuum de parole synthétique, un individu dyslexique tendra à hésiter plus précocement qu’un individu sans trouble de perception catégorielle signifiant que l’individu dyslexique entend plus tôt la différence acoustique (Serniclaes et al., 2012)

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